La Polyarthrite
Rhumatoïde |
1. Définition
La polyarthrite rhumatoïde (PR) est le plus
fréquent des rhumatismes inflammatoires chroniques.
-
touche environ 0.5% de la population, quatre fois plus
souvent la femme;
-
peut survenir à n'importe quel âge mais
surtout entre 35 et 55 ans.
Sa gravité est la conséquence de l’inflammation
chronique de la membrane synoviale articulaire. Cette inflammation entraîne
progressivement une destruction de l’os et du cartilage, responsable de
l’atteinte fonctionnelle.
La PR est aussi une maladie systémique dont
les manifestations extra-articulaires peuvent mettre en jeu le pronostic
vital.
Véritable problème de santé
publique car:
-
50 % des malades ont arrêté leur activité
professionnelle moins de 5 ans après son début;
-
la durée de vie des patients est en moyenne réduite
de 5 ans;
-
les dépenses dues à cette maladie sont
élevées, plus à cause de l’exclusion du système
économique actif que des dépenses médicales et pharmaceutiques.
2. Physiopathologie
La PR est une affection dont l’origine précise
n’est pas connue. Cependant on classe la PR comme une maladie auto-immune
à cause de la présence de signes auto-réactivité.
Plusieurs facteurs favorisants ont été
identifiés:
-
hormonaux: nette prédominance féminine,
contrôle durant la grossesse;
-
génétiques: liaison incomplète
avec les gènes HLA DR 4 mais uniquement pour certains sous-types
de DR 4 (DRB1 0401, 0404) et DR 1 (DRB1 0101), présents respectivement
dans 60 et 38 % des cas). Il faut noter que la concordance pour la PR chez
des soeurs jumelles homozygotes n’est que de 17.5 %;
-
environnementaux: on suspecte sans pouvoir l’affirmer,
l’intervention d'antigènes infectieux bactériens (protéines
de choc thermique de mycobactéries) ou viraux (rétrovirus
exogènes voire endogènes).
La compréhension des conséquences de l’inflammation
de la membrane synoviale est plus précise. Elle conduit à
plusieurs applications thérapeutiques en cours d’extension.
L’inflammation de la synoviale réalise une
synovite chronique caractérisée par l’interaction entre des
cellules mononucléées issues du sang qui après migration
entrent en contact avec les cellules mésenchymateuses articulaires
(fibroblastes / synoviocytes).
La formation de la synovite de PR réalise
un pannus dont la chronicité entraîne la destruction de l’os
et du cartilage. Précocement une note une hyperplasie par prolifération
des cellules bordantes c’est à dire proches de la cavité
articulaire, une néovascularisation intense favorisant la migration
des lymphocytes surtout CD 4 de phénotype mémoire dont l’accumulation
forme des nodules lymphoïdes périvasculaires.
Ces lymphocytes expriment des marqueurs d’activation
et contribuent à la sécrétion de cytokines de type
Th1. Secondairement, ces lymphocytes directement et par l’intermédiaire
de leurs facteurs solubles activent les cellules résidantes entraînant
la sécrétion de cytokines proinflammatoires comme l'interleukine
1; le tumor necrosis factor alpha, l'interleukine 6. Ces cytokines activent
les cellules mésenchymateuses qui libèrent des enzymes de
type métalloprotéases, responsables des effets de dégradation.
En contraste, il existe un déficit local de
production des cytokines de type Th2 qui ont un effet anti-inflammatoire
comme l'interleukine 4 et l'interleukine 10.
Cette activation cellulaire locale entraîne
une accumulation cellulaire qui résulte d’une augmentation de la
prolifération non compensée par l’élimination par
mort cellulaire programmée ou apoptose, qui est déficitaire.
L’inflammation locale prolongée est susceptible
d’induire des modifications moléculaires assez superposables à
celles mise en évidence au niveau des cellules tumorales. La présence
d’activation, voire de mutations de certains oncogènes (p53, p21)
permet de rendre compte de la difficulté d’un contrôle de
ces anomalies à un stade tardif. Cette approche pousse à
un contrôle thérapeutique le plus précoce possible
non seulement des éléments inflammatoires mais plus encore
des capacités locales de prolifération cellulaire.
3. Aspects
cliniques:
Le diagnostic doit être fait le plus précocement
possible, en particulier avant la destruction articulaire. C’est à
ce stade qu’un traitement a des chances d'être efficace.
Il faut totalement opposer deux tableaux:
-
au début, le diagnostic est difficile à
poser; les diagnostics différentiels sont nombreux;
-
tardivement, le diagnostic est le plus souvent évident,
mais le traitement est difficile.
3.1 Polyarthrite rhumatoïde au début:
Le diagnostic est avant tout clinique, repose sur
l’interrogatoire et l’examen clinique.
3.1.1 L’oligo-arthrite distale (70 %)
évocatrice selon:
-
localisation: poignets, métacarpo-phalangiennes
(surtout 2 et 3 ème), avant-pieds;
-
caractère: fixe et relativement symétrique;
-
douleurs: inflammatoires, nocturnes, maximales au réveil,
avec enraidissement articulaire (raideur matinale), diminuant après
un dérouillage articulaire;
-
signes cliniques objectifs: discrets, plus nets le matin
avec articulations enraidies, parfois tuméfiées;
-
l’élément le plus évocateur: la
ténosynovite des extenseurs ou des fléchisseurs des doigts
avec souvent un syndrome du canal carpien, du cubital postérieur
(localisation évocatrice), des péroniers latéraux.
3.1.2 La polyarthrite aiguë fébrile (20
%)
-
avec altération de l'état général.
3.1.3 Formes de début plus rares
-
l’atteinte rhizomélique (hanches et épaules),
surtout après la soixantaine;
-
la mono-arthrite subaiguë ou chronique: d’abord
éliminer une arthrite infectieuse;
-
les manifestations intermittentes et migratrices du
rhumatisme palindromique;
-
les manifestations extra-articulaires isolées
(vascularite, atteinte pleuro-pulmonaire, ...).
3.1.4 Explorations complémentaires
A ce stade, n'apportent pas d'éléments
spécifiques, le diagnostic est avant tout clinique:
-
radiographies: normales ou simple ostéoporose
en bande métacarpo-phalangienne;
-
biologie: syndrome inflammatoire non spécifique
(VS, CRP), anémie; recherche du facteur rhumatoïde en général
négative;
-
étude du liquide synovial, voire biopsie synoviale
plus pour éliminer d’autres diagnostics.
Liquide synovial: inflammatoire, riche en protéines
et en cellules, surtout polynucléaires avec taux de complément
synovial (C4) abaissé;
Biopsie synoviale: le plus souvent, lésions
de synovite subaiguë non spécifique. Sont évocateurs:
l’hyperplasie des villosités et des couches bordantes; la néovascularisation
et l’infiltrat lympho-plasmocytaire formant des nodules périvasculaires.
3.2 Phase d'état ou phase déformante
Correspond à l'apparition des déformations
caractéristiques de la maladie. Ce n’est plus un problème
diagnostique, mais thérapeutique.
3.2.1 Manifestations articulaires
-
évoluent par poussées,
-
pouvant toucher toutes les articulations sauf rachis
dorsal et lombaire et sacro-iliaques.
Les mains (90 % des cas):
-
déformation la plus caractéristique: la
déviation cubitale des doigts;
-
déformations des doigts en boutonnière,
en col de cygne, du pouce en Z ou en adduction;
-
noter l’absence de corrélation entre les déformations
et la fonction.
Les poignets (90 %):
-
arthrite radio-cubitale inférieure avec gêne
à la supination;
-
luxation dorsale de la tête cubitale en touche
de piano, menaçant de rupture les extenseurs.
Les pieds (90 %):
-
surtout l'avant-pied et articulations métatarso-phalangiennes
avec hallux valgus (avant-pied plat triangulaire) d’où la gène
à la marche et pour le chaussage;
-
l'arrière-pied: arthrite astragalo-scaphoïdienne
ou sous-astragalienne.
Les genoux (60 %):
-
souvent avec un kyste du creux poplité dont la
rupture évoque une phlébite; risque de flexum à prévenir.
Les hanches (15 %):
-
grave du point de vue fonctionnel,
-
dégâts souvent importants conduisant fréquemment
à une arthroplastie.
Les coudes (40 %):
-
attitude en flexion et gène à la pronosupination.
Les épaules (50 %):
-
limitation progressive en adduction et en rotation interne
par synovite rhumatoïde scapulo-humérale et surtout par bursite
sous-deltoïdienne avec atteinte de la coiffe des rotateurs.
Le rachis cervical (50 %):
-
cervicalgies avec ou sans irradiation (nerf d’Arnold);
-
atteinte discale inflammatoire, source d’instabilité;
-
fréquence de l’atteinte de la charnière
cervico-occipitale;
-
rechercher une luxation atloïdo-axoïdienne
(clichés de profil en flexion).
3.2.2 Ténosynovites
-
pratiquement constantes, exposent au risque de ruptures
tendineuses;
-
touchant les extenseurs des doigts, le cubital postérieur,
les fléchisseurs des doigts avec syndrome du canal carpien ou ténosynovite
crépitante ou nodulaire responsable de blocages;
-
aux membres inférieurs, surtout les jambiers
et les péroniers latéraux.
3.2.3 Manifestations extra-articulaires
-
surtout au cours de PR sévères, anciennes,
avec facteur rhumatoïde à titre élevé.
Nodules rhumatoïdes (20 %):
-
siégeant surtout aux coudes, dos des mains, tendons
d'Achille.
Manifestations pleuro-pulmonaires:
-
pleurésies;
-
fibroses interstitielles diffuses, surtout si syndrome
de Gougerot-Sjögren associé;
-
nodules rhumatoïdes pulmonaires à différencier
d'une tumeur;
-
complications dues au traitement: bronchiolite (D-pénicillamine
ou tiopronine) ou pneumopathie d’hypersensibilité (Méthotrexate),
mais aussi infections en particulier opportunistes (pneumocystoses).
Atteintes cardio-vasculaires:
-
péricardite la plus fréquente, exceptionnellement
constrictive;
-
lésions valvulaires, troubles de la conduction,
rares;
-
vascularite rhumatoïde, grave avec:
-
multinévrite, surtout du sciatique poplité
externe, parfois du nerf cubital;
-
ulcérations atones des membres inférieurs;
-
plus rarement vascularite viscérale: tube digestif,
myocarde, cerveau.
Manifestations neurologiques:
-
névrites d'origine ischémique;
-
névrites sensitives distales;
-
compression tronculaire (nerf cubital au coude ou nerf
médian au poignet);
-
compression médullaire due à une luxation
atloïdo-axoïdienne (risque d’aggravation lors d’une mobilisation
sous anesthésie générale).
Manifestations ophtalmologiques :
-
Syndrome de Gougerot-Sjögren ou syndrome sec: kérato-conjonctivite
sèche (xérophtalmie) avec impression de sable dans les yeux,
liée à un tarissement des sécrétions lacrymales
(mesuré par le test de Schirmer) et salivaires (xérostomie).
-
Il est dit secondaire lorsqu’il est associé à
une autre maladie, souvent la PR. Le diagnostic se fait sur la biopsie
des glandes salivaires accessoires montrant un infiltrat lymphoïde;
-
Sclérite, voire scléromalacie perforante,
dans le cadre d’une vascularite.
Manifestations musculaires
-
amyotrophie satellite des arthropathies;
-
myosite surtout si syndrome de Gougerot-Sjögren;
-
médicamenteuses: myosite ou myasthénie
induites par dérivés thiolés.
Amylose
-
protéinurie souvent massive avec syndrome néphrotique;
-
insuffisance rénale rapide;
-
diagnostic et typage par biopsie rectale, salivaire
ou rénale;
-
pronostic réservé mais intérêt
des traitements immunosuppresseurs.
Manifestations hématologiques:
-
adénopathies (30 à 70 % des cas);
-
splénomégalie: l’association à
une leucopénie responsable de surinfections à répétition
constitue le syndrome de Felty.
3.2.4 Examens complémentaires
Signes radiographiques
retardés de plusieurs mois par rapport aux
données cliniques;
sévérité très variable;
signes d'arthrite:
-
pincement de l'interligne articulaire;
-
érosions osseuses et géodes;
-
ostéoporose localisée,
-
tardivement luxations secondaires aux lésions
destructrices.
-
Au carpe, évolution de l’ostéoporose isolée
jusqu’à la carpite fusionnante;
-
Au pied, l'érosion de la tête du 5e métatarsien
est précoce et très caractéristique.
-
Quantification des lésions par divers indices
radiographiques (Steinbrocker, Sharp, Larsen).
Signes biologiques et immunologiques
syndrome biologique inflammatoire:
augmentation de la VS, CRP, alpha-2 et gammaglobulines;
hyperplaquettose;
anémie avec fer bas; le plus souvent anémie
inflammatoire avec taux élevé de ferritine; ou mixte si taux
de ferritine bas, par saignement le plus souvent digestif.
facteur rhumatoïde:
-
auto-anticorps dirigé contre le Fc des IgG. Seuls
les facteurs rhumatoïdes agglutinants de classe IgM sont détectés
par les réactions d'agglutination de Waaler-Rose, par le test au
Latex ou par népholémétrie Laser; les tests ELISA,
plus sensibles mais aussi moins spécifiques, permettent la détection
des autres classes.
-
en général ne sont positifs que 6 mois
après le début de la maladie;
-
sensibilité: 60 à 80 %, plus faible pour
la réaction de Waaler-Rose. En l’absence de facteur rhumatoïde,
on parle de PR séro-négative.
-
non spécifiques car positivité possible
au cours de connectivites, surtout syndrome de Gougerot-Sjögren, maladies
infectieuses (endocardite), affections pulmonaires, hépatiques,
hématologiques (cryoglobulines mixtes), sujets normaux surtout âgés.
anticorps antikératine et antipérinucléaires:
-
leur utilisation ne se fait pas en routine car leur
mise au point est délicate.
-
dirigés contre une protéine de l’épiderme,
la filaggrine;
-
très spécifiques de la polyarthrite rhumatoïde.
anticorps antinucléaires (15 à 30 %):
-
titre généralement faible, rarement avec
présence d’anticorps anti-ADN natif
étude génétique
-
sans intérêt majeur pour le diagnostic;
-
plus mauvais pronostic pour les sous-types de HLA DR
4, 0401 et 0404.
3.2.5 Evolution
La PR est une maladie très hétérogène,
dont la gravité est variable d'un malade à l'autre. Il est
important de noter pour la discussion du traitement que la majorité
de la destruction articulaire survient au cours des deux premières
années.
Le suivi se fait :
-
sur les données cliniques: indice d’activité
de la maladie (Ritchie, voir annexe I), du retentissement fonctionnel (Lee);
durée de la raideur matinale; nombre d’articulations actives;
-
sur les données biologiques: syndrome inflammatoire;
-
sur les données radiographiques: vitesse de dégradation
et divers indices (Larsen);
-
sur la réponse aux traitements.
Les facteurs de mauvais pronostic sont: l'importance
du syndrome inflammatoire; taux élevé de facteur rhumatoïde;
début polyarticulaire; la présence des gènes HLA DR
4; érosions radiologiques précoces, mauvaise réponse
au premier traitement de fond.
La PR arrête souvent (60 %) son évolution
pendant la grossesse et reprend après l'accouchement.
4. Diagnostic
différentiel
Difficile au début, il dépend du mode
de présentation de la maladie. L'American College of Rheumatology
(ACR) a proposé des critères de classification de la PR (voir
annexe II). Ils sont souvent pris en défaut lorsqu’il s’agit de
formes incomplètes ou atypiques. Souvent seule l’évolution
permet de préciser le diagnostic exact. Il est important de revoir
le malade et de n’utiliser à ce stade qu’un traitement symptomatique
simple. L’utilisation d’une corticothérapie à dose forte
d’emblée risque de masquer les symptômes, ne permettant plus
de différencier une PR d’une autre maladie cortico-sensible.
4.1 Mono-arthrite
Dans ce contexte, la première urgence diagnostique
est celle de mono-arthrite infectieuse, notamment tuberculeuse, par étude
du liquide synovial, par biopsie de la synoviale (cytologie, culture, PCR).
Les maladies inflammatoires ne seront évoquées qu’ensuite.
4.2 Polyarthrites d'origine infectieuse
-
septicémie, en particulier à streptocoque,
staphylocoque ou gonocoque, surtout si terrain immunodéprimé;
-
endocardite avec signes articulaires et facteur rhumatoïde;
-
maladie de Lyme par Borrelia burgdorferi, secondaire
à une piqûre de tique avec signes cutanés initiaux,
rechercher les signes neurologiques (méningo-encéphalite),
cardiaques; diagnostic par sérologie voire PCR;
-
infections virales (hépatite B, hépatite
C, rubéole, parvovirus B19, retrovirus HTLV1, VIH).
4.3 Groupe des spondylarthropathies
-
comprend: arthrites réactionnelles, spondylarthrite
ankylosante, rhumatisme psoriasique, rhumatisme de la maladie de Crohn
et de la rectocolite ulcéro-hémorragique;
-
révélées par une arthrite réactionnelle
évocatrice si caractère asymétrique, atteinte axiale
et sacro-iliaque, talalgies, prédominance masculine, présence
de l'antigène HLA B27, manifestations extra-articulaires (urétrite,
iritis, diarrhée, lésions muqueuses génitales ou buccales)
réalisant une forme complète ou non de syndrome oculo-urétro-synovial
de Fiessinger-Leroy-Reiter; après infection à: Chlamydia,
mycoplasme, Yersinia, Shigella, Salmonella.
4.4 Connectivites
syndrome de Gougerot-Sjögren primitif surtout:
-
avec ses arthralgies migratrices, voire synovites sans
érosion articulaire, taux élevé de facteur rhumatoïde,
syndrome sec buccal (xérostomie) et oculaire (xérophtalmie)
mesuré par le test de Schirmer et affirmé par la biopsie
des glandes salivaires accessoires.
-
Il existe des formes incomplètes où les
signes articulaires réalisent le rhumatisme bénin intermittent.
-
autres connectivites: lupus, connectivite mixte, sclérodermie.
Valeur d’orientation de la recherche des anticorps antinucléaires.
4.5 Polyarthrites d'origine microcristalline
-
goutte (hyperuricémie) et surtout chondrocalcinose
(liséré calcique sur les radiographies) en particulier chez
le sujet âgé;
-
affirmé par la présence de microcristaux
d'urate (goutte) ou de pyrophosphate (chondrocalcinose) dans le liquide
synovial.
4.6 Autres rhumatismes inflammatoires
-
La pseudo-polyarthrite rhizomélique:
-
après la soixantaine, avec importante altération
de l'état général avec fièvre, atteinte articulaire
rhizomélique et myalgies;
-
chercher les signes associés de maladie de Horton;
-
Le diagnostic différentiel avec une PR à
début rhizomélique est très difficile; seule l'évolution
tranchera, en particulier devant les difficultés de diminution de
la corticothérapie.
-
La maladie de Still de l'adulte:
-
signes articulaires inflammatoires avec poussées
fébriles et lésions cutanées fugaces;
-
importante hyperleucocytose et taux très élevé
de ferritine.
-
Les rhumatismes paranéoplasiques:
-
l'ostéo-arthropathie hypertrophiante pneumique
de Pierre Marie est un rhumatisme inflammatoire touchant surtout les grosses
articulations, associé à un hippocratisme digital et à
une périostose radiologique; souvent associé à un
cancer du poumon.
5. Traitement
5.1 Principes généraux
-
Le traitement de la PR doit être institué
aussitôt que possible et comporte quatre grands volets:
-
information du malade (brochures d'information des associations
de malades, soutien psychologique, adaptation socioprofessionnelle);
-
traitements médicamenteux généraux
et locaux;
-
réadaptation fonctionnelle;
-
traitement chirurgical.
-
Ces moyens thérapeutiques sont associés
au mieux dans le cadre d'une prise en charge globale multidisciplinaire.
5.2 Traitements symptomatiques
-
améliorent les douleurs mais n'influencent peu
ou pas l'évolution.
-
antalgiques purs dont paracétamol et ses dérivés;
-
anti-inflammatoires non stéroïdiens à
doses souvent élevées qui exposent, à des degrés
divers, aux risques digestifs d’intolérance;
-
corticothérapie avec des corticoïdes à
durée de vie courte (Cortancyl*, Solupred*), en une prise matinale.
Posologie faible de l'ordre de 10 à 15 mg par jour, réduite
ensuite si possible;
-
plus rarement corticothérapie IV sous forme de
bolus (Solumédrol*).
5.3 Traitements de fond
susceptibles d'arrêter ou de freiner l'évolution
de la PR. La démonstration définitive de ces actions est
difficile à obtenir car elle impose des études longues chez
des malades traités à un stade précoce avant destruction.
5.3.1 Sels d'or:
Allochrysine* injectable IM:
Posologie: traitement d’attaque: 0.10 g / semaine;
posologie totale: 3 cg/kg. Si résultat favorable, traitement d'entretien:
0.10 g tous les 21 jours ou tous les mois.
Surveillance: hémogramme avec plaquettes tous
les mois, protéinurie avant chaque injection.
Effets secondaires (30 % ):
-
stomatite, prurit et lésions érythémateuses
pouvant aller jusqu'à l'érythrodermie;
-
protéinurie aboutissant parfois à un syndrome
néphrotique;
-
leucopénie, thrombopénie.
5.3.2 Méthotrexate:
Posologie: 7,5 à 15 mg / semaine en une seule
prise
per os ou par voie intramusculaire.
Action plus rapide que les autres traitements de
fond en 1 mois au lieu de 3 mois.
Contre-indications:
-
hépatopathies chroniques (éthylisme),
affections respiratoires, insuffisance rénale.
-
association avec le Bactrim* (agranulocytose).
-
surveiller les associations médicamenteuses susceptibles
de modifier les taux sanguins (diurétiques, anti-inflammatoires
non-stéroïdiens) surtout chez les sujets âgés.
-
Effet tératogène, nécessitant une
contraception efficace.
Surveillance: hémogramme complet avec plaquettes,
créatinine et transaminases / mois.
Effets secondaires:
-
nausées, stomatite évités par l'utilisation
d'acide folique à faible dose (Speciafoldine*, 1 cp à 5 mg
/ j sauf lors de la prise du Méthotrexate);
-
infections virales (zona, herpès) ou bactériennes
(pneumocystoses);
-
hépatite cytolytique: Si augmentation des transaminases
d'au moins deux fois la normale, arrêt provisoire du Méthotrexate.
Si cette augmentation persiste, discuter biopsie hépatique;
-
leucopénie, thrombopénie, voire aplasie
mécanisme toxique ou allergique;
-
pneumopathies d'hypersensibilité: accident rare
mais pouvant être grave
-
toux après administration, dyspnée et
fièvre; syndrome interstitiel clinique et radiologique avec syndrome
restrictif; Résultats à comparer au cliché pulmonaire
et à l’exploration fonctionnelle réalisés avant traitement;
impose l’arrêt du traitement, éventuellement l’exploration
pulmonaire (lavage broncho-alvéolaire pour éliminer une pneumopathie
infectieuse) et traitement symptomatique (corticoïdes).
-
rares lymphomes secondaires, parfois associés
au virus d’Epstein-Barr, parfois résolutifs à l'arrêt
du traitement.
5.3.3 Antipaludéens de synthèse:
Posologie: Plaquenil*, 2 cp à 200 mg par jour;
Surveillance : essentiellement ophtalmologique: électrorétinogramme
tous les 6 mois;
Effets secondaires: risque de dépôts
cornéens réversibles et de rétinopathie irréversiblerarement
prurit, troubles digestifs.
5.3.4 Salazopyrine:
-
Posologie : progressive, atteignant 4 à 6 cp
à 500 mg/j;
-
Surveillance: hémogramme / mois;
-
Effets secondaires: thrombopénie, leucopénie,
éosinophilie, troubles digestifs, érythème.
5.3.5 Dérivés thiolés:
Posologie: D-pénicillamine (Trolovol*) *:
1 cp à 300 mg / jour pendant 1 mois, puis 2 voire 3 cp / jour; tiopronine
(Acadione*): 2 puis 4 cp à 250 mg / jour;
Surveillance: hémogramme avec plaquettes et
protéinurie tous les mois;
Effets secondaires:
-
stomatite, prurit et lésions érythémateuses;
-
protéinurie aboutissant parfois à un syndrome
néphrotique;
-
leucopénie, thrombopénie;
-
Induction possible de maladies auto-immunes: anticorps
antinucléaires, exceptionnellement lupus induit, pemphigus, myasthénie
ou polymyosite
5.3.6 Immunodépresseurs:
-
Ciclosporine (Sandimmun): 2.5 à 5 mg/kg/J en
deux prises à 12 heures d’intervalle.
-
surveillance: très rigoureuse de tension artérielle
et fonction rénale.
-
Azathioprine (Imurel*): 2 cp à 50 mg /j .
-
Cyclophosphamide (Endoxan*) per os ou plutôt en
perfusions mensuelles.
-
Avec ces médicaments, risque d'induction d'hémopathies
(lymphomes).
5.3.7 Traitement local et chirurgical:
-
évacuation des épanchements articulaires,
-
infiltration de corticoïdes en nombre limité
et, en cas de récidive des synovites;
-
synoviorthèses isotopiques ou chimiques (acide
osmique);
-
synovectomie sous arthroscopie ou par arthrotomie.
5.3.8 Traitement chirurgical:
Le traitement chirurgical a transformé le
pronostic fonctionnel (prothèses des grosses articulations). Les
indications chirurgicales sont discutées au mieux au cours de consultations
médico-chirurgicales. Il faut privilégier une chirurgie plus
précoce.
chirurgie précoce:
-
libération du canal carpien
-
ténosynovectomie des extenseurs ou des fléchisseurs
des doigts (prévention des ruptures);
-
synovectomie de l’épaule;
-
synovectomie du poignet associée à une
résection de la tête cubitale.
chirurgie tardive:
-
arthroplasties de la hanche ou du genou;
-
arthroplasties de l’épaule, du coude
-
réalignement des avant-pieds;
-
arthrodèse métacarpo-phalangienne du pouce
ou du poignet;
-
arthrodèse occipito-C1 C2 en cas de luxation
atloïdo-axoïdienne avec risque médullaire.
5.3.9 Réadaptation fonctionnelle:
-
fait partie intégrante du traitement;
-
appareillages de repos utilisés durant la nuit
pour éviter les déformations des mains; portés des
deux côtés, sinon, en alternance.
-
appareillages dynamiques, pour réduire l’enraidissement;
-
importance de la kinésithérapie et de
l'ergothérapie pour mieux adapter l’environnement professionnel
et domestique;
-
confection d'orthèses plantaires avec barre rétro-capitale,
et chaussage spécialisé si nécessaire.
5.4 Indications du traitement
Eléments communs:
-
traitement médicamenteux général
avec antalgiques, anti-inflammatoires non stéroïdiens;
-
traitement local: appareillages de repos, infiltrations,
synoviorthèses
-
réadaptation fonctionnelle.
Choix du traitement de fond:
Il faut noter une évolution des approches.
L’approche classique qui reste valable, envisage
l’utilisation progressive et successive des traitement de fond, allant
des plus simples (Plaquenil, puis sels d’or, puis dérivés
thiolés) au plus lourds (Méthotrexate). C’est la classique
progression en pyramide.
L’approche plus récente considère qu’il
faut utiliser précocement les médicaments les plus efficaces
et les mieux tolérés. Ceci correspond donc à la pyramide
inversée. De fait actuellement le Méthotrexate est le médicament
le plus utilisé car ce médicament a le meilleur rapport efficacité
/ tolérance.
On peut cependant nuancer ces conclusions et proposer
les indications suivantes:
PR au début à type d'oligoarthrite
d'intensité moyenne: Plaquenil, Salazopyrine, Allochrysine;
PR avec signes systémiques: corticothérapie
générale per os, à une posologie d'attaque de 0,25
à 0,50 mg/j, avec réduction progressive lorsque le délai
d’action des traitements de fond sera atteint;
PR de sévérité habituelle: Méthotrexate
avec ou sans corticoïdes à faibles doses;
PR réfractaire: ciclosporine seule ou en association
au Méthotrexate; autres associations médicamenteuses;
PR active et désir de grossesse: corticoïdes,
ciclosporine, Imurel (référence au traitement des greffes
d’organe)
PR avec vascularite, neuropathie, amylose: corticoïdes
et perfusions mensuelles d’Endoxan.
5.5 Traitements innovants:
Plusieurs traitements expérimentaux issus
des concepts immunologiques sont en cours de développement . Ces
principales approches sont les suivantes:
contrôle des cytokines inflammatoires:
par des anticorps monoclonaux (anti-TNF-a), des récepteurs
solubles de cytokines (IL 1, TNF-a) , l’antagoniste du récepteur
de l’IL 1 (IL 1Ra);
par l’apport de cytokines anti-inflammatoires (IL
4, IL 10, IL 13, IFNb) ou par l’induction de leur production endogène.
contrôle de l’action des cytokines inflammatoires:
par blocage des activités enzymatiques destructrices
par activation de leur inhibiteurs naturels
contrôle des lymphocytes T:
par blocage de leur migration en agissant sur les
molécules d’adhésion (anti-ICAM-1)
par blocage de leur interaction en agissant sur les
molécules d’interaction (CD 28, CTLA-4)
par contrôle plus sélectif de certaines
sous-populations à rôle proinflammatoire en respectant les
lymphocytes T protecteurs.
action sur des cibles spécifiques:
par vaccination avec des peptides antigèniques,
de récepteurs T pathogènes
action globale sur le système immunitaire:
par greffe de moelle allo ou autologue.
D’autres concepts et approches nouvelles sont en
cours d’élaboration.
En attendant le traitement préventif ou radicalement
curatif de la polyarthrite rhumatoïde, c'est sans aucun doute la prise
en charge globale par une équipe pluridisciplinaire qui constitue
actuellement la meilleure approche thérapeutique de cette maladie.
Annexe
Critères de l’American College of Rheumatology
1987
pour la classification de la polyarthrite rhumatoïde
Au moins 4 des 7 critères sont exigés.
Les critères 1 à 4 doivent être
présents depuis au moins 6 semaines.
-
1- Raideur matinale durant au mois 1 heure
-
2- Arthrites d’au moins 3 groupes articulaires
-
3- Arthrites touchant les mains
-
4- Arthrites symétriques
-
5- Nodules rhumatoïdes
-
6- Facteur rhumatoïde sérique présent
-
7- Signes radiologiques
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